jeudi 1er février 2007 par Michèle Collin , Thierry Baudouin
Inversement, le changement de production de richesses, s’il met l’usine en position subalterne, ne la fait nullement disparaître.Tous les gens du Sud, principalement, s’en félicitent qui accèdent ainsi au revenu du travail industriel et, plus avant, à la conflictualité inhérente à la croissance du revenu du travail industriel.
Jusqu’à présent, dans ce séminaire, le rôle concret de la cité en tant que nouvelle communauté productive dans la circulation post industrielle reste considéré de manière abstraite ainsi que les pratiques dans cette cité qui sont liées à cette affirmation. Or l’analyse ne peut se limiter à la constatation d’un changement des formes d’exploitation et au positionnement de la ville à la place de l’usine. Il n’y a en effet nullement substitution terme à terme et il faut préciser rapidement d’entrée quelques points essentiels du rapport de l’une à l’autre.
a) LA VILLE ET L’USINE
D’une part, la ville telle que nous l’entendons n’est pas un espace manufacturier dont le capital est, ou pourrait être, propriétaire. Il ne s’agit plus de Clermont-Ferrand ni de Michelin. C’est bien un territoire, c’est-à-dire un espace sujet d’appropriations multiples. Cela implique essentiellement que le rapport frontal antagonique qui caractérisait l’usine industrielle ne suffit pas pour appréhender ce que nous appelons « la ville productive » . On ne peut par exemple dire que la force de travail aurait une capacité cognitive souterraine dans la ville, à la manière dont Mallet, Mothé ou Lodgkine décrivaient encore récemment le savoir non reconnu de la classe ouvrière dans l’usine. L’innovation n’est plus subordonnée au capital comme dans l’usine.
Inversement, le changement de production de richesses, s’il met l’usine en position subalterne, ne la fait nullement disparaître.Tous les gens du Sud, principalement, s’en félicitent qui accèdent ainsi au revenu du travail industriel et, plus avant, à la conflictualité inhérente à la croissance du revenu du travail industriel. Et chez nous aussi, au Nord, des dizaines de millions de gens effectuent des activités matérielles dans des entreprises . Ce n’est nullement résiduel : une part prépondérante des profits du capital est toujours adossée aux marchandises, quoiqu’en dise l’idéologie technocratique du « tout services ».
Tant pour la qualité que pour l’éthique de la réflexion sur le travail, il est impossible d’opposer les composantes matérielle et immatérielle du travail et encore moins d’éliminer la première. Une large partie des manipulations-transformations de plus en plus nombreuses des marchandises se fait à présent sur les lieux même de leur valorisation, au sein des marchés les plus développés. Le travail matériel se trouve intimement liée à la production cognitive, immatérielle, et le fantasme occidentalo-centriste d’une délocalisation totale des taches matérielles vers le sud repose sur une méconnaissance des mécanismes réels de la circulation globale.
Plus le capital peut faire fabriquer n’importe quoi - n’importe où, plus la contextualisation du produit sous une forme et avec des services spécifiques à un marché implique au contraire de lier étroitement des prestations matérielles et immatérielles. C’est très précisément pour cette raison que la ville, un territoire précisément contextualisé regroupant des compétences et des coopérations multiples, matérielles et immatérielles, est le lieu où ce type de production cognitive se met en œuvre, y compris dans sa dimension proprement matérielle.
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